Festival des Templiers

Le récit du WE par Benoît

Sur les traces des chevaliers du Temple et des légendes du trail

Vendredi 20 octobre 2023 : rendez-vous à Millau

Le légendaire festival des Templiers : c’est ce qui attendait les dix-huit courageux qui s’étaient donné rendez-vous, dès potron-minet (entre 6h15 et 6h30) devant la pharmacie de la Gare de Lyon, ce qui ne nous a heureusement pas porté l’œil. Tout le monde était à l’heure ; Arnaud, en dormant chez moi, avait évité les difficultés de l’année précédente quand il avait raté le train pour Rennes à quelques minutes près. Seul Paul, blessé, manquait à l’appel. Sa course contre la montre, façon Antoine Dupont, avait été contrecarrée par son toubib moins compréhensif que celui du demi de mêlée national en lui interdisant de participer à notre sortie, même en mode rando (l’histoire allait confirmer que cet avis médical n’était pas dénué de jugeotte).

Au départ, nous trouvions donc :

  • Françoise, notre doyenne multi-récidiviste qui s’alignait sur la Templière, course de 7 km (300 D+) réservée à la gent féminine avec un départ à 13h30 le lendemain.
  • Marie-Odile et Fouzia, des habituées de ces week-ends, engagées sur les Troubadours, départ à 14h30 pour un peu plus de 11 km (550 D+).
  • Bruno et Franck, participants émérites en 2021 à l’expédition « SaintéLyon », la première post-covid, concourant sur les 17 km (700 D+) du VO2 Trail.
  • David, Sylvie, Fabien, Rémi et François qui allaient se mesurer à la Monna Lisa (pas d’erreur, c’était bien l’orthographe consacré en référence à une difficulté locale) et ses 29 km (1200 D+) à partir de 9h30.
  • Arnaud, Charles, Raphaël et moi-même affronterions le Marathon des Causses qui n’affichait « que » 35 km (1600 D+) avec départ peu après midi.
  • Hadrien, Briac, Xavier et Ludovic pour le must du samedi, la Boffi Fifty et ses 48 km (2400 D+) dès 8 heures.

Après un voyage en train sans histoire, hormis une sollicitation du contrôleur pour que nous participions prochainement au trail de Salagou qu’il organisait, nous arrivâmes à la gare de Montpellier Sud de France et prîmes possession de nos bolides pour rejoindre Millau. Arrivés à destination, nous fîmes un petit tour au salon du trail : récupération des dossards et des pack cadeau (différents en fonction des épreuves ce qui ferait l’objet de beaucoup des discussions au cours du week-end) dont celui de Paul, photos souvenirs parrainées par Hoka, menus achats pour finir de s’équiper et récupérations de flyers pour de potentielles futures escapades avant de grignoter des produits locaux (flan au lait de brebis ou sandwich à la tomme par exemple). Certains d’entre nous cherchèrent, en vain, à changer de vague afin d’être mieux positionnés lors des départs du lendemain. Las, aucune dérogation n’était possible. Seul Charles aurait pu être upgradé, notamment du fait de sa participation au dernier Ecotrail de Paris - 80 km mais il s’en abstint pour partir avec Arnaud et Raphaël et je renonçais moi-même au bénéfice de mon affectation en vague 1, incompréhensible d’ailleurs, pour rester avec les copains : je n’avais pas prévu de jouer la gagne et partir quinze minutes après la première vague ne me traumatisait pas vraiment.

Vers 16h00, nous avions rejoint l’hôtel Cap Vert à Saint-Affrique à une trentaine de kilomètres de la ligne de départ. Cet hébergement, bien que sommaire et sans charme particulier, allait remplir son office : nourriture en quantité et qualité suffisantes, chambres simples mais confortables, environnement calme et dénué de tentation (au moins le vendredi). David allait quand même partir se farcir un petit douze kilomètres avant de diner (c’est beau la jeunesse) pendant que d’autres se dégourdiraient les jambes sur des distances plus raisonnables et que la majorité resterait OKLM dans sa chambre.

A 19h, dîner et organisation des transports pour le lendemain. A 21h, haka (Neo-zed-Argentine). A 23h au plus tard, tout le monde au lit, la journée du lendemain nous réservant nécessairement quelques surprises et, pour certains au moins, un lever aux aurores.

Samedi 21 octobre 2023 : le jour des braves

Le lendemain, dès 6 heures j’étais dans le réfectoire pour le petit déjeuner, néanmoins devancé par les 4 fantastiques de la Boffi qui ne semblaient pas particulièrement anxieux, et rejoint peu après par les 5 inconscients de la Monna Lisa, le départ de la seconde voiture (la première emportant les fantastiques) étant prévu à 8h. Aucun souci pour atteindre le départ à temps, nous eûmes même le temps de déposer nos sacs à la consigne et de prendre quelques photos de groupe avant qu’ils ne s’élancent depuis la vague 2, David caracolant devant, Rémi et François à quelques encablures et Fabien et Sylvie fermant le contingent CA Sports sur cette épreuve.

Pour ma part, il me restait quelques heures à tuer avant de m’élancer à mon tour. Je les mis à profit pour récupérer nos tickets d’aligot-saucisse-bière, installer sur l’appli Live Trail le suivi des potes déjà en courses (notamment les 4 « Boffi » qui s’étaient déjà cogné la première difficulté sur laquelle nous allions tous perdre une partie de nos forces et de nos illusions) et finir de me préparer tranquillement dans le parking (vaseline, baume du tigre, élastoplasme notamment). Tout en contemplant les vautours qui cerclaient au-dessus du site, je m’assurai également que chacun avançait à son rythme et passait les différents points de contrôle régulièrement. Hormis un chassé-croisé entre Xavier et Ludovic (j’appris après la course que le premier, dans le mal, n’avait pu suivre le second malgré son invitation lorsqu’ils s’étaient retrouvés sur les chemins) et la constatation que Fabien avait lâché Sylvie, je n’appris rien d’inquiétant. Les « gamins » Hadrien, Briac et David tenaient un rythme assez soutenu chacun dans son coin et les duettistes Rémi et François ne se quittaient pas, à croire que, comme Rémi l’avait suggéré avant le départ, l’un des deux portait l’autre (Don Salluste et son fidèle Ruy Blas).

Enfin, rejoint peu avant midi par mes partenaires de galère et Françoise qui partait une heure après nous, nous nous dirigeâmes vers l’aire de départ. Nous y aperçûmes Dominique Chauvelier (Chauchau), ancien recordman de France du marathon qui faisait office de speaker, esquissâmes quelques pas de zumba (on aurait aimé se défiler mais, au premier rang, ce n’était pas possible) et, après que le traditionnel Enae Volare d’ERA ait retentit, nous nous élançâmes sur les premiers kilomètres d’asphalte.

Arnaud partit avec la tête, bien décidé à rejoindre et dépasser au plus tôt les concurrents plus lents que lui qui avaient eu l’heur de s’élancer avec la première vague. Nous l’aperçûmes quelques temps avant qu’il ne disparaisse définitivement. Charles, Raphaël et moi avions décidé d’être plus raisonnables. Néanmoins, emportés par la foule, notre rythme était assez soutenu (les deux premiers km en 10 mn) et nous attînmes la première difficulté après 6 kms déjà bien essoufflés. La côte de Carbassas allait nous ramener à la raison et je dû notamment m’arrêter pour faire redescendre un cardio qui flirtait avec les 180 pulsations/mn alors que je ne faisais que marcher. J’attendis Charles qui avait quelques mètres de retard et lui emboitait le pas jusqu’à ce que lui-même soit obligé de s’arrêter après une glissade provoquée par un terrain rendu instable par les pluies des derniers jours. En effet, si nous allions être épargnés par les intempéries pendant notre épreuve (ou alors quelques gouttes éparses sans impact particulier), la semaine précédente avait été plus qu’humide et notre terrain de jeu était assez glissant par endroits. Et ce ne sont pas les passages successifs de centaines de traileurs qui allaient arranger les choses.

Arrivé en haut de cette première difficulté (8 km réalisés), le single en bord de falaise se révéla un terrain de jeu vraiment plaisant : le panorama était incroyable, nos foulées à peine alourdies par l’effort de la demi-heure précédente et la descente vers le premier ravito (en réalité un simple point d’eau) fut sans difficulté majeure. Pour autant, nous n’avions parcouru qu’un peu plus de 11 km et je sentais déjà que les jambes ne répondaient pas comme je l’espérais. L’abandon d’un concurrent local, visiblement habitué de l’épreuve, me mit le doute mais j’avais suffisamment fait le fanfaron la veille en fixant à chacun l’objectif « aller, demain, tous finishers », pour ne pas m’arrêter après un petit tiers de courses. D’ailleurs, les notifications que je recevais sur ma montre concernant les participants à la Boffi et à la Monna montraient que, si les rythmes pouvaient différer et que les souffrances devaient être importantes, tout le monde était encore fidèle au poste.

J’attendis un peu pour me refaire une santé en espérant apercevoir Charles ou Raphaël mais après quelques minutes infructueuses, je repartais en prenant en main mes bâtons. La seconde difficulté allait passer beaucoup plus facilement ; j’arrivais en haut « dans le mal » mais pas aussi entamé que je l’aurais cru. De fait, je pu poursuivre à un rythme plutôt correct : je marchais en montée et me faisais régulièrement doubler mais j’étais plutôt mieux que les autres dans les portions planes et les descentes où je me refaisais la cerise. Au 2nd ravitaillement, après 21 km, j’étais encore suffisamment gaillard et ne doutais plus de pouvoir finir.

De leur côté Françoise, Marie-Odile et Fouzia avaient pris le départ de leur pensum et il ne restait plus que Bruno et Franck à devoir s’élancer.

Le parcours jusqu’au ravitaillement suivant fut à peu près sans histoire (relativement à ce que j’avais vécu) et après avoir mangé deux tartines de roquefort, je repartis, jouant avec une descente glissante que je ne maîtrisais pas trop mal finalement. Je ne m’attendais pas au morceau de choix qu’il restait : la montée de la Pouncho d’Agast avec certains passages qui frisaient l’escalade et où les traileurs qui avaient dédaigné se munir de bâtons allaient devoir utiliser leur main pour gravir des pentes rocheuses qui devaient bien dépasser les 45 degrés (et donc les 100% de dénivelé). Ces deux kilomètres de montée furent un enfer, avec des embouteillages dignes de la barrière de péage de Saint-Arnoult un jour de retour de week-end du 15 août, des jérémiades, des pleurs, des glissades, des chutes et finalement le sommet ! Petite déception vite évacuée : le parcours du Marathon des Causses ne passait pas par la célèbre « Grotte du Hibou » que d’autres épreuves proposaient pourtant.

Encore deux kilomètres de descente en criant « gauche » pour signaler mes dépassements (un bonheur comparé à tout ce qui avait précédé malgré des quadriceps qui m’insultaient) et je savourais l’arrivée sous l’arche en bois d’arbre. Personne devant, personne derrière, je pouvais y aller tranquillement sans sprinter avec une seule idée en tête : il fallait que je donne les tickets « aligot » à tous ceux à qui je n’avais pas pu les confier au matin puisqu’ils arpentaient déjà les Causses.

Je pris quand même le temps de récupérer ma médaille (dont les concurrents des épreuves de distance inférieure ne bénéficièrent pas à leur grand dam) et ma veste sans manche finisher (mais qu’allais-je bien pouvoir faire d’une telle pelisse ?), et profitai un peu de l’ambiance caractéristique des arrivées, et du sentiment de soulagement et de fierté que chacun d’entre nous ressentait. Je me sustentai un chouia (nouvelle tartine de roquefort au passage, eau gazeuse et cola local infâme) avant de claudiquer quelques hectomètres supplémentaires pour rejoindre les autres membres de ma team vers le lieu où ils s’étaient attablés pour panser leurs menues blessures et rejouer goulûment le match. Je distribuai mes derniers tickets et, nanti du sentiment du devoir accompli, je me laissai enfin aller et fis également part à mes coreligionnaires de mes impressions et sentiments. J’étais un peu hagard mais j’ai quand même souvenir d’avoir été amusé par l’inattendue volubilité d’Hadrien lors de son récit de course et par l’obsession de Rémi pour le délicieux roquefort qu’on pouvait acquérir sur place. David et Arnaud regrettait tous deux ce départ en vague 2 alors que le placement dans la vague précédente leur aurait sans doute permis un encore plus joli résultat que celui qu’ils avaient obtenu. Françoise me raconta son interview réalisée dans l’aire d’arrivée, événement qui se produit quasiment systématiquement quand elle participe à une épreuve pédestre. Enfin, je fis la connaissance sympathique du fan-club d’Arnaud (arrivé 1h30 avant moi !) personnalisé par son épouse et ses trois filles ; elles avaient rejoint leur héros et ils poursuivraient les vacances tous les cinq du côté de Rodez en nous quittant le lendemain matin.

Tous ceux arrivés avant moi avaient pris le temps de se doucher mais je renonçai à faire de même, attendant l’arrivée de Charles et Raphaël, Bruno et Franck pour prendre ma plus belle récompense : un demi ambré. Les 3 premiers arrivèrent assez rapidement (et nous allâmes chercher bières et assiettes d’aligot) mais Franck allait devoir utiliser la frontale pour rejoindre la ligne d’arrivée ce qui, connaissant la fin du parcours (une longue descente assez boueuse et traitresse) nous inquiéta quelque peu : nous ne serions rassurés que quand le dernier esquif de notre fière flottille rallierait le port.

Enfin peu après 20h et juste avant la fermeture de la « cabane à aligot », Franck arriva, euphorique, ravi de sa journée et de son exploit, nous décrivant tous les points de vue où il s’était arrêté pour photographier le paysage.

Moins d’une heure après, nous prenions le chemin de l’hôtel, et de son bar pour quelques-uns, afin de nous reposer ou mettre fin à un mois sans alcool pour Charles accompagné de Fabien, David, Raphaël (éteint), Franck et moi. Nous regardâmes sans émotion particulière la 2nde demi-finale de la Coupe du Monde de Rugby dont le quinze tricolore était absent du fait de la combinaison d’erreurs grossières en première mi-temps, d’un arbitrage discutable et du finish de notre valeureux adversaire avant de lancer une dernière expédition avec le barman du bar de l’hôtel après sa fermeture. Celui-ci nous conduisit, Charles, Franck et moi, au Café du Commerce, centre névralgique de Saint-Affrique où toute la jeunesse locale s’était réunie pour boire des whiskey-cocas avant d’aller au Plo, nom de la discothèque locale dont l’étymologie resterait un mystère malgré l’enquête approfondie que nous mènerions auprès des autochtones. Ça, et la quête entreprise par Franck auprès du DJ du café (oui, il y avait même un DJ) pour passer sa play-list à base de Sardou et Rose Laurens resteraient nos seuls échecs de la journée avant que nous alliions enfin nous coucher.

Dimanche 22 octobre 2023 : retour au bercail

Le lendemain, les corps plus ou moins meurtris (certains eurent le courage d’aller se décrasser par un petit run aux alentours) nous reprîmes le chemin de Montpellier après qu’Arnaud nous ait quitté avec sa famille. Une halte shopping pour ramener à Paris les spécialités du coin, un passage par Palavas les Flots pour une pizza (encore merci à ceux qui me l’ont payée), voir la mer et arpenter doucement le bord du rivage, une petite promenade dans le centre de Montpellier, en mode pèlerinage pour les anciens étudiants locaux (Sylvie, Xavier et moi), puis ce fut l’heure de rendre nos bolides et de monter dans le train pour revenir à la capitale et retrouver nos foyers. Un dernier stress pour Françoise qui crut ne pas pouvoir avoir de RER A pour Poissy mais finalement ce week-end s’acheva parfaitement nous laissant des souvenirs inoubliables, le sentiment d’avoir vécu un moment collectif rare, fraternel et intense qui marquerait nos carrières de traileurs pour un long moment et l’envie d’y retourner très vite, mais après quelques jours de repos tout de même.

Les résultats

La templière Date Samedi 21 octobre 2023
190 arrivants     Distance 7,3 kms
Classement NOM Prénom Temps officiel Temps réel Classement catégorie/tps officiel Arrivants Catégorie Catégorie
182 LE GALL Françoise 01:22:51 3 3 M7-M8F
Les Troubadours    
354 arrivants     Distance 11,4 kms
Classement NOM Prénom Temps officiel Temps réel Classement catégorie/tps officiel Arrivants Catégorie Catégorie
179 BOUCHÉ Marie-Odile 01:42:57 5 18 M5-M6F
334 JACQUETIN Fouzia   02:29:51 17 18 M5-M6F
VO2 Trail    
895 arrivants     Distance 17,2 kms
Classement NOM Prénom Temps officiel Temps réel Classement catégorie/tps officiel Arrivants Catégorie Catégorie
333 GARNIER Bruno 02:19:52 30 80 M3-M4H
890 AUDIBERT Franck 04:09:32 88 88 M1-M2H
La Monna Lisa    
799 arrivants     Distance 29,4 kms
Classement NOM Prénom Temps officiel Temps réel Classement catégorie/tps officiel Arrivants Catégorie Catégorie
30 JAFFRÉ David 03:00:33 20 187 S-M0H
266 JEANNERET François   04:08:14 6 45 M5-M6H
379 SIROLLI Rémi   04:26:24 72 120 M1-M2H
618 COMPIN Fabien 05:10:09 84 106 M3-M4H
782 ZENNARO Sylvie 06:42:33 20 20 M5-M6F
Marathon des Causses    
1052 arrivants     Distance 34,9 kms
Classement NOM Prénom Temps officiel Temps réel Classement catégorie/tps officiel Arrivants Catégorie Catégorie
75 PELLOIN Arnaud 04:10:54 10 234 M1-M2H
485 DUCHESNE Benoît   05:41:02 44 116 M3-M4H
701 LESCOAT Charles 06:07:44 75 116 M3-M4H
741 MAURY Raphaël 06:19:57 260 309 S-M0H
Boffi fifty    
720 arrivants     Distance 46,6 kms
Classement NOM Prénom Temps officiel Temps réel Classement catégorie/tps officiel Arrivants Catégorie Catégorie
121 FORNARA Hadrien 06:43:57 71 216 S-M0H
138 DESMARCHELIER Briac 06:52:25 76 216 S-M0H
358 BON Ludovic 08:08:29 40 92 M3-M4H
464 CASSEDANNE Xavier 08:44:13 58 92 M3-M4H

Quelques souvenirs

Commentaires (1)

1. Christophe 07/11/2023

Félicitations à tous ! Quelle épreuve ! Merci Benoît pour ce superbe récit. Amitiés

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Date de dernière mise à jour : 28/01/2024